Eric Westram réélu maire de Rosemère, malgré la controverse

Le maire sortant de Rosemère, Eric Westram, conserve la gouvernance de la municipalité des Basses-Laurentides, alors que plusieurs citoyens dénoncent sa gestion opaque du dossier de la vocation de l’ancien golf de Rosemère, dont le projet de développement immobilier vient d’être bloqué par Québec.
Avec près de 55% des voix, Eric Westram est réélu maire pour un deuxième mandat, devant le candidat du Collectif Avenir Rosemère, Pierre-André Geoffrion, qui a recueilli 45% des voix. En 2017, M. Westram l’avait remporté avec 63,9 % des voix.
En entrevue avec L’Atelier, le maire s’est dit satisfait des résultats. « C'est toujours très agréable de recevoir une majorité de gens qui vous envoient une vague de confiance et d'affection. […]La démocratie s’est prononcée », déclare-t-il.

Depuis le début des consultations publiques en 2018, la Ville entend consacrer la moitié du terrain (30 hectares) en lotissement immobilier, et l’autre moitié en espace vert. Elle maintiendrait le statu quo tant qu’une étude environnementale ne sera pas faite sur le terrain. La plateforme électorale du Collectif Avenir Rosemère prévoyait transformer au moins 88,5 % du golf en espace vert.

Lorsqu'est abordée la question de l'avenir du golf de Rosemère, l’ancien gestionnaire en marketing défend la vision urbanistique de sa formation et juge que les informations dévoilées dans La Presse en septembre sont incomplètes. On y apprenait que le site du golf était contaminé par des taux de mercure et d'arsenic supérieurs à la limite acceptable en milieu résidentiel.
Le candidat défait, Pierre-André Geoffrion, s'avoue déçu du dénouement électoral. Il reste tout de même fier d'avoir réussi à récolter 45 % des voix, alors qu'il n'était auparavant qu'un illustre inconnu auprès de la population rosemèroise. Son parti se donne maintenant pour mission d'être le « chien de garde » de la démocratie.
Le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) n'approuve pas le projet de développement immobilier dans sa proposition actuelle. Le MAMH craint un accroissement de l'achalandage routier près de l'autoroute 117 où se trouve le golf, qui connaît déjà des problèmes de circulation.
Selon une analyse indépendante de Peter Trent, maire de la ville de Westmount de 1991 à 2001 et membre du conseil d'administration de l’Union des municipalités du Québec de 2009 à 2017, l’arrivée de 630 résidences potentielles sur le terrain de l’ancien golf générerait une augmentation des taxes pour les citoyens.
Celui qui est aussi professeur de marketing à l’Université Concordia prédit qu'un accroissement de 13% de la population avec ces nouvelles résidences se traduirait par une augmentation de 10% (3,2 millions de dollars) du coût de la prestation des services locaux et régionaux, soit une moyenne de 216 $ de taxes en plus par ménages. Lors d’une soirée d’information à propos du projet préliminaire de plan d’urbanisme, la Ville prévoyait plutôt une réduction moyenne de 170 $ sur l'impôt foncier des ménages.
Un manque de transparence, selon des opposants
Le porte-parole de Greenpeace et membre du collectif Rosemère Vert, Patrick Bonin, juge que le maire Westram a fait piètre figure dans le dossier de l’ancien golf : « Sa gestion a été totalement problématique. [Il] manque de transparence. [Il s’est entêté] à aller de l’avant, malgré une mobilisation citoyenne jamais vue. » Le militant écologiste ajoute que le maire a profité de la pandémie pour restreindre l’accès des citoyens aux conseils de ville, par exemple en faisant s'asseoir dans les sièges limités de la salle du conseil des membres de sa propre formation.
Au printemps 2021, l'administration a commandé un sondage à la firme Léger Marketing pour connaître la perception des citoyens sur le projet de plan d'urbanisme. Le sondage demandait notamment « Récemment, la Ville a annoncé qu’elle souhaitait préserver un minimum de 50 % de la superficie de l’ancien terrain de golf en espaces verts et en milieux naturels. Personnellement, quel est votre degré d’accord avec cette position ? ». À cette question, 72 % des répondants ont déclaré être en accord.
Or, 65 % des répondants affirment connaître peu ou pas le dossier. Pour Patrick Bonin, la formulation de la question a induit la population en erreur. « C'est de la désinformation. Ça porte à confusion. Les gens veulent évidemment un minimum de 50 % de parc, mais rien n'indique qu'ils peuvent exiger plus », déplore-t-il.
Une campagne jugée problématique
M. Bonin affirme que des aînés ont reçu des chèques d’un montant de 100 $ signés par le maire lui-même durant la campagne électoral, sous le motif d’encourager le maintien à domicile.
Dans une lettre ouverte publiée le 1er novembre 2021 dans le journal régional Le Nord Info, la résidente de Rosemère et documentariste, Hélène Choquette, ainsi que l’ex-conseiller municipal à la Ville de 2005 à 2013, Claude Roy, dénoncent certaines manœuvres d'InnovAction Plus, qui iraient à l’encontre des bonnes pratiques démocratiques : « Quand on accède au portail Internet de la ville de Rosemère, on tombe d’entrée de jeu sur un encadré nous invitant à consulter des documents expliquant la vision de l’administration Westram quant à l’avenir du golf. En mettant ainsi ce dossier particulièrement chaud de l’avant, l’administration utilise-t-elle l’appareil municipal à des fins de communications partisanes ? », se questionnent les deux citoyens.
Ils mentionnent aussi l’apparition de petites pancartes blanches non autorisées vantant l’expérience de la Ville. D’ailleurs, le bureau du Directeur général des élections du Québec a annoncé le 29 octobre qu’un dossier serait ouvert au Service des affaires juridiques et qu’une enquête pénale pourrait être réalisée.