UNION : se détacher pour mieux se reconnecter

Lee Bae s'est inspiré de son mal du pays pour se réapproprier son identité.

UNION : se détacher pour mieux se reconnecter

Entre sculptures, tableaux, dessins et vidéo, l'exposition UNION de Lee Bae nous emmène dans un univers de méditation et de cohésion avec cet élément cher au cœur de l'artiste : le charbon, un moyen de se reconnecter avec ses racines coréennes et son identité.

Présentée par la Fondation PHI, l'exposition UNION créée par l'artiste Lee Bae propose une variété d'œuvres autour d'une seule matière : le charbon. Lors d'une entrevue accordée à L'Atelier, la commissaire d'exposition, Cheryl Sim, explique que cette exposition raconte le lien qu'entretient l'artiste avec son pays d'origine " Il a quitté la Corée pour Paris afin de se découvrir en tant qu'artiste, mais c'est en mettant de la distance entre lui et son pays natal qu'il a réussi à se connecter avec la mémoire et avec son art ", explique-t-elle.

Cette notion de mémoire est au cœur du travail de Lee Bae qui lui donne un sens différent que celui relié aux souvenirs. Ici, il est question de la " mémoire du corps " qui est distincte de la " mémoire consciente " puisque c'est l'importance des souvenirs que le corps retient. C'est pour cela que le charbon entre en jeu, car ce matériau a plusieurs sens et vertus pour les communautés asiatiques.

Un matériau aux mille sens

Dans la culture asiatique, le charbon est souvent utilisé dans les maisons pour assainir et purifier les lieux. Il est aussi utilisé à l'entrée des maisons lors d'une nouvelle naissance pour créer une aura de protection. Dans les pays d'Asie, le noir est également la couleur de " toutes les couleurs " en raison de ses reflets chromatiques. C'est aussi ces croyances qui ont inspiré l'artiste.

Lee Bae commence par dessiner avec des petits bâtons de charbon puis il s'attaque à de gros blocs qu'il va par la suite couper, assembler et coller pour créer des toiles aux mille reflets. Son art continue dans sa ville natale à Cheongdo où il choisit les pins qu'il brûlera dans des fours pendant deux semaines afin de créer ses sculptures. " Les pins sont des arbres robustes et importants dans la culture coréenne puisqu'ils symbolisent la longévité ", raconte Mme Sim.

Au sens propre comme au figuré

La symbolique derrière le mot " union " qui a été choisi par la commissaire d'exposition est importante. Ce mot lui est venu de manière évidente : " c'était un mot logique, car Lee Bae a construit son art à partir d'une rupture entre lui et son pays natal, mais grâce à cet art il a réussi à retrouver cette connexion avec ses origines. "

Pour Lee Bae, l'histoire du charbon vient du pouvoir de ce matériau. Alors que le bois est brûlé pour devenir charbon, il subit, de façon métaphorique, la mort. Mais il a aussi ce pouvoir de renaître puisque le charbon est ensuite utilisé comme combustible pour produire du feu et finalement devenir créateur. Mme Sim raconte que c'est un vrai symbole du cycle de la vie, mais aussi de la fragilité de celle-ci, car le charbon est une matière fragile et poreuse. " Ce qui m'a frappé avec ses œuvres, c'est le lien de corporalité, mais surtout le calme qui s'en dégage et t'oblige à t'arrêter pour contempler ", raconte la commissaire d'exposition quant au pouvoir du symbole que devient le charbon dans cette exposition.

" C'est fou à quel point il pousse la matière. Chaque couche resserre ce lien de cohérence entre les œuvres pour en faire une histoire ", avoue Mme Sim avec un sourire dans les yeux. L'héritage coréen est au cœur de cette exposition aux multiples sens qui vient apporter un peu de calme dans la tourmente.