Un 50e acte à l’image d’ici
DOSSIER: Les 50 ans de la compagnie de théâtre Duceppe. Célébrer la culture québécoise.

Les codirecteurs artistiques en poste depuis maintenant six ans, Jean-Simon Traversy et David Laurin, souhaitaient célébrer en grand la cinquantième saison de Duceppe. Une programmation anniversaire 100% québécoise qui crée un précédent pour les prochaines années.
Jean Duceppe crée, en 1973, la compagnie de théâtre qui porte son nom. Depuis, plus de 255 pièces ont été présentées et moins de 20% d’entre elles étaient des créations québécoises.
Afin de célébrer les cinquante années du théâtre Duceppe, les codirecteurs artistiques ont décidé de mettre à l’avant-scène cinq créations originales d’ici : Nathalie Doummar avec Mama, le Projet Bocal avec Showtime : une grosse pièce de théâtre, Louis Bélanger avec Gaz Bar Blues, Naomi Fontaine avec Manikanetish et Robert Lepage avec Le projet Riopelle.
« Dans le cadre du 50e, on voulait quelque chose de franc, de fort et de très actuel aussi. La création nous permet ça ; nous pencher sur notre société », mentionne David Laurin, codirecteur artistique de Duceppe.
Pour les prochaines programmations, David Laurin annonce qu’il compte « revenir vers des textes de la dramaturgie anglo-saxonne tout en maintenant un petit peu plus de québécois que ce qu’on faisait dans le passé. On peut s’attendre à voir deux pièces québécoises par année chez Duceppe alors qu’historiquement, ce n’était qu’une par année ».
Fleuron de la créativité
Traditionnellement, lorsqu’un auteur souhaite écrire une pièce, il doit prendre de son temps et de son argent pour créer une nouvelle œuvre dramaturgique. Toutefois, en 2017, les codirecteurs ont créé les résidences d’écriture d’une durée de deux ans, permettant aux auteurs de se concentrer sur la création d’une nouvelle pièce de grande enver gure, tout en recevant une bourse de 15 000$.
Mama et Showtime : une grosse pièce de théâtre sont le fruit des résidences d’écriture des dernières années. L’idée d’une saison entièrement axée sur la création d’ici s’est alors concrétisée grâce à ces résidences.
Après des recherches, David a eu un coup de cœur pour le roman de Naomi Fontaine, Manikanetish. « Si on était pour dire et acclamer que c’était une saison 100% québécoise, et bien c’était impensable de ne pas avoir la parole d’un ou d’une artiste autochtone », explique Jean-Simon Traversy.
Pérenniser la mission de Duceppe
Le mandat de base pour Jean-Simon Traversy et David Laurin en devenant les successeurs de Michel Dumont, directeur artistique de Duceppe durant 27 ans, était d’ouvrir le théâtre à toutes les générations. De plus, le vœu de ces deux têtes créatives était d’amener le public dans de nouvelles directions, d’essayer de rejoindre le grand public et de le pousser à réfléchir à des enjeux contemporains de notre société afin de pérenniser les valeurs de Jean Duceppe.
« Dans une perspective d’ouverture, on parle d’ouvrir à toutes les générations. Ça veut aussi dire d’ouvrir à tous les portefeuilles », dit M. Laurin.
Ton âge, ton prix est une promotion chez Duceppe depuis 2017 qui permet aux jeunes adultes de 18 à 35 ans de payer leur billet à un prix qui correspond à leur âge. Cette initiative a fait augmenter de 10% la présence des moins de 35 ans dans la salle.
La diversité a plusieurs fronts
En 2019, un rapport sur la place des femmes au théâtre a démontré le manque de représentation au théâtre au sein des équipes de création, pour les metteuses en scène et les autrices. Plus de 60% des postes étaient occupés par des personnes s’identifiant comme étant des hommes.
La programmation 2022-2023 de Duceppe offre un éventail de diversité ; 54% des comédiens sont issus de la diversité culturelle et une hausse des femmes au sein des équipes de création est remarquée. D’ailleurs, dans les postes de pouvoir chez Duceppe, il y a le souhait d’avoir une parité. « Ce n’est pas tant un quota, mais une cible qu’on se donne », confie Jean-Simon Traversy.
Selon David Laurin et Jean-Simon Traversy, la codirection leur permet de pousser leurs réflexions toujours plus loin, de se questionner mutuellement et de pouvoir prendre du recul devant chaque grande décision. « On est extrêmement complémentaires. On travaille avec nos forces. Ça fait en sorte qu’on devient comme une super-personne », dit avec enthousiasme David Laurin.
« Notre petit pouvoir qu’on a en tant que directeurs artistiques chez Duceppe, c’est d’inviter des artistes à raconter des histoires, de choisir des pièces écrites par des gens aux perspectives différentes. », dit Jean-Simon Traversy.
Les attentes pour les prochaines saisons sont hautes après une cinquantième saison aussi diversifiée. Jean-Simon et David souhaitent explorer des conflits internationaux jamais abordés chez Duceppe, faire une place à la relève, traduire les meilleurs textes étrangers, rester à l’affût et surtout, continuer de douter.