Restauration : une réouverture teintée par le manque de main d'œuvre
Les restaurants ont rouvert leurs portes le 31 janvier dernier, mais la main-d'œuvre, épuisée par des décisions yo-yo du gouvernement, n'est pas au rendez-vous pour cette troisième réouverture des salles-à-manger montréalaise.
Daniel Silva Reyes, le chef exécutif de Barranco, un restaurant péruvien situé sur la rue Saint-Denis et ouvert depuis mai 2021, se dit heureux de la réouverture des salles-à-manger, tout comme l'ensemble de son équipe.
Le Barranco a une équipe complète, mais, lors de la fermeture le 31 décembre dernier, le restaurant a conservé plus d'employés que nécessaire pour la formule take-out et a accordé à chacun des heures minimales. Ainsi, il a pu s'assurer une main-d'œuvre suffisante lorsque le restaurant pourrait tabler. " Engager une équipe de cuisiniers est difficile, on voulait conserver le plus de personnes possibles ", explique Daniel Silva Reyes.
Une main-d'œuvre chancelante
Raphaëlle Neuhofer Vallée a commencé à travailler aux Enfants Terribles Outremont en novembre 2019, peu avant la première fermeture. Depuis, plusieurs membres du personnel ont quitté.
À l'époque, le restaurant comptait quatre gérants et un directeur. Aujourd'hui, il n'a ni gérant, ni directeur et peu d'employés. Pour pallier le problème, l'établissement n'ouvre que les soirs, du mercredi au dimanche.
Dû à la précarité des emplois en restauration en raison des nombreuses fermetures, " peu de personnes commencent en restauration sans expérience comme avant, et plusieurs ont quitté parce qu'ils faisaient moins d'argent ", explique la barmaid aux Enfants Terribles Outremont.
Celle qui est aussi étudiante vit chez ses parents. Néanmoins, pour les personnes qui sont en appartement, le stress lié au loyer et l'incertitude qui plane sur l'industrie en démotive plusieurs, qui décident de changer de domaine d'emploi, souligne-t-elle, en se remémorant la démission de plusieurs de ses anciens collègues.
Daniel Silva Reyes a aussi vu plusieurs de ses anciens collègues changer de métier. Une histoire l'a particulièrement marquée. Un cuisinier qu'il connaissait et travaillait dans le milieu depuis vingt ans a démissionné pour aller étudier en ingénierie. " La restauration est caractérisée par une cadence dans les cuisines, mais la formule takeout ne satisfait plus ces critères. Les plus anciens travailleurs peuvent en être insatisfaits ", explique-t-il.
Attirer la main-d'œuvre et la conserver
Pour attirer la main-d'œuvre, le gouvernement doit faire en sorte que le secteur d'activité économique de la restauration ne soit plus autant affecté par les variants, selon Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l'Association des restaurateurs du Québec (ARQ).
" Le 31 décembre, les travailleurs ont subi une perte d'emploi à moins de 24h de préavis. Il faut un travail en continu pour essayer d'être plus attractif ", reconnaît-il. L'industrie de la restauration se bute à un autre obstacle au recrutement : il est en compétition avec d'autres secteurs qui sont moins à risque de fermeture soudaine en raison de la situation pandémique.
Les acteurs du milieu questionnés demeurent optimistes et espèrent que l'industrie ne sera plus frappée par une fermeture. Ainsi, l'industrie attirera une nouvelle main-d'œuvre qui pourra espérer demeurer dans le métier.