Quand le régime sec devient une source de pression

Les jeunes non-consommateurs victimes de pression à boire

Quand le régime sec devient une source de pression
L’INSPQ conclut à la suite d’une étude que 89 % des jeunes entre 18 ans et 24 ans ont consommé de l’alcool au moins une fois au cours de l’année 2017-2018 Éduc’Alcool

Les étudiants postsecondaires qui font le choix de ne pas boire subissent de la pression de leurs pairs, qui se sentent confrontés à leur propre consommation.

«Ceux qui boivent n’ont pas nécessairement une réflexion sur leurs propres habitudes de consommation, donc quand ils voient quelqu’un qui fait le choix de ne pas consommer d’alcool, ça vient les confronter et ils se remettent inconsciemment en question», explique Katia Bissonnette, psychologue experte en toxicomanie.

«Quand quelqu’un se présente de manière assumée et qu’en plus elle est capable d’avoir du vrai plaisir à jeun, ça peut devenir vraiment irritant et confrontant pour ceux qui boivent», renchérit-elle.

Émeric Amon Sareault est étudiant en deuxième année de technique policière au Collège d’Ahuntsic. En raison de son passage aux études collégiales, il participe à de nombreux événements sociaux dans lesquels l’alcool coule à flots et fréquente plusieurs bars. Pourtant, M. Amon Sareault a fait le choix, dès son plus jeune âge, de ne pas consommer d’alcool, promesse qu’il tient encore à ce jour.

En ce sens, l’étudiant a souvent senti de la pression de la part de ses amis, l’invitant à prendre un verre avec eux. Cette pression a augmenté depuis son entrée au cégep. « Ça arrive souvent [que j’ai de la pression des pairs pour consommer de l’alcool]. C’est surtout : “aujourd’hui, tu bois avec nous!”. Ils se sentent mal pour moi que je ne bois pas, mais ils ne réalisent pas que pour moi l’alcool n’est pas un besoin», affirme le jeune homme.

Une étape presque inévitable

Selon l’étudiant, la consommation d’alcool chez les jeunes adultes est une étape presque inévitable et il comprend que son entourage peut être surpris d’apprendre qu’il ne boit pas. « On fait beaucoup de partys entre amis et les gens autour de moi boivent beaucoup. C’est rare qu’il y en ait qui ne boivent pas. »

Mme Bissonnette abonde en ce sens. « La période universitaire est une période assez stressante donc c’est normal que [les étudiants] essaient de réguler ce stress-là par des substances psychoactives, même si ce n’est pas nécessairement le meilleur moyen », explique la psychologue.

Elle pense également que les étudiants utilisent l’alcool comme moyen pour se dégêner et créer plus facilement des liens sociaux.

Malgré l’abondance de l’alcool dans ses activités sociales et la pression qu’on exerce sur lui pour qu’il boive, Émeric trouve le moyen d’avoir du plaisir. « Ça ne me dérange pas du tout que tout le monde boive autour de moi. J’apporte toujours mes boissons et, des fois je me fais des consommations sans alcool et, des fois, on m’en fait, donc c’est cool. »

Les motivations

Pour le futur policier, cette décision de ne pas boire a des racines familiales puisque son grand-père était alcoolique. Quant à la mère d’Émeric, elle ne boit pas puisque, dans la culture africaine, il est mal vu que les femmes s’adonnent à cette activité. « Donc en fait, j’ai vécu dans un milieu où il n’y a jamais eu d’alcool à la maison », exprime-t-il.

Rendu au cégep, il a poursuivi cette habitude « En technique policière, je dois avoir une certaine éthique, une certaine rigueur et avec mon budget d’étudiant ça ne me tente pas d’avoir ces dépenses-là. »

Pour Katia Bissonnette, plusieurs réflexions peuvent amener les gens à décider de ne pas boire. « Ça peut être pour des raisons religieuses, ou encore de santé mentale ou physique. Il n’est pas nécessaire d’être alcoolique pour arrêter de boire », plaide-t-elle.