Les femmes sont moins nombreuses que les hommes à voter au municipal

Les femmes sont moins nombreuses que les hommes à voter au municipal

Le débat féministe en visioconférence organisé par le Conseil des Montréalaises (CM) et la Table des groupes de femmes de Montréal (TGFM), le 26 octobre dernier, fait partie des solutions pour encourager plus de femmes à voter lors des élections municipales.

Par Laetitia Arnaud-Sicari et Marie-Soleil Lajeunesse

Les candidates Karine Boivin Roy d’Ensemble Montréal, Dominique Ollivier de Projet Montréal et Anastasia Pomares de Mouvement Montréal ont présenté des propositions pour améliorer la qualité de vie des femmes et pour encourager ces dernières à se rendre aux bureaux de vote.

Leurs suggestions touchaient quatre principaux thèmes : la place des femmes dans la relance économique, le logement pour les femmes, la sécurité dans les espaces publics et la transition écologique.

« On a été un peu étonné [par le fait que] les partis ont proposé presque les mêmes choses avec des mots différents […] On nous a fait entendre ce qu’on voulait entendre », indique Marie-Ève Desroches, doctorante en études urbaines à l’Institut national de la recherche scientifique et chargée de projet à la TGFM.

Pour appuyer leurs idées, des candidates ont également mentionné les plateformes de revendications du CM et de la TGFM, comme le Guide féministe pour les élections municipales 2021 créé par les deux regroupements.

Certaines personnes qui ont assisté à la conférence croient que plusieurs enjeux importants n’ont pas été mis de l’avant par les candidates. C’est notamment le cas de Mme Desroches qui a été surprise de constater que les enjeux reliés à l’itinérance n’avaient pas été abordés lors du débat.

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, la doctorante et chargée de projet explique que les stratégies de survie des femmes ont été bouleversées : les groupes de femmes accueillent plus de personnes itinérantes. « Les interventions sont plus complexes [avec les femmes itinérantes] et les groupes de femmes ont besoin de plus de ressources », souligne Mme Desroches.

La professeure en géographie sociale à l’Université du Québec à Montréal, Anne Latendresse, qui a également assisté à l’événement, croit que les candidates auraient pu développer en profondeur le thème du logement pour les femmes, comme celles qui vivent des situations d’abus et de violence.

Le nombre de féminicides pourrait diminuer si des logements étaient réservés aux femmes, selon Mme Latendresse. « Ça sécuriserait les femmes à la fois sur le plan physique et sur le plan mental », précise-t-elle.

La professeure en géographie sociale à l’Université du Québec à Montréal, Anne Latendresse, signale que plusieurs femmes ne quittent pas leur conjoint violent parce que « le seul endroit où elles peuvent se réfugier est la rue ». (Photo fournie par Marie-Soleil Lajeunesse)

Néanmoins, Mme Latendresse considère que les choix de thèmes étaient intéressants puisqu’ils reflétaient les préoccupations sur le terrain des femmes de différents quartiers de Montréal.

Un taux de participation plus faible chez les électrices

Selon une étude menée par la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires en 2021, le taux de participation des hommes lors des élections municipales en 2017 était supérieur à celui des femmes. En effet, près de 71,7 % de l’électorat masculin avait voté contre 62,43% chez les électrices.

« Je crois que les femmes sont moins portées à voter, car elles ne s’identifient pas aux personnes candidates », croit Véronique Martineau, coordonnatrice pour la TGFM et organisatrice du débat diffusé en visioconférence.

Toutefois, la Ville de Montréal a dérogé à cette règle lors des élections municipales en 2017. D’après le bilan de l’élection générale du 5 novembre 2017 pour la métropole, les électrices étaient 41 742 de plus que les électeurs à avoir voté.

Mme Martineau pense que la candidature de Valérie Plante pour Projet Montréal comme mairesse a incité plus de femmes à participer aux élections parce qu'elles se sentaient mieux représentées.

Valérie Plante est la première femme qui a été élue comme mairesse de Montréal. (Photo fournie par la page Facebook de Valérie Plante)

La doctorante et chargée de projet Marie-Ève Desroches souligne aussi que la complexité du système politique municipal peut décourager plusieurs personnes d’y participer.

« Il y a des guides qui existent pour décortiquer le système municipal, mais [la compréhension de ce système à Montréal] est compliquée en raison des différents paliers municipaux, comme le district, l’arrondissement, la mairie, le conseil d’agglomération, la région métropolitaine. Il y a une formalité sur les enjeux qui ne vont juste pas susciter la passion », explique-t-elle

La ressemblance des plateformes électorales des différents partis peut également dissuader l’électorat féminin de voter, selon Mme Desroches.

« À Montréal et ailleurs au Québec, il y a peu de sujets polarisants. Au municipal, tout le monde veut bien déneiger les routes, bâtir des logements et améliorer les infrastructures. Après, c’est dans les moyens et [c’est] comment on y arrive. »

Les autres solutions pour inviter les femmes à voter

À part l’organisation d’un débat féministe, d’autres solutions existent pour inciter les femmes à se rendre aux bureaux de vote, le 7 novembre prochain. Véronique Martineau affirme que le porte-à-porte et le travail sur le terrain sont notamment des moyens efficaces pour entrer en contact avec de potentielles électrices.

La candidate pour Ensemble Montréal, Karine Boivin Roy, a accompagné le chef de son parti, Denis Coderre, lors de rencontres avec les citoyens et les citoyennes de l’arrondissement Mercier–Hochelaga-Maisonneuve en octobre dernier. (Photo fournie par la page Facebook de Karine Boivin Roy)

L’éducation entourant les différentes instances politiques doit être valorisée auprès des femmes, selon Mme Martineau. Elle ajoute que la TGFM organise plusieurs ateliers avec d’autres groupes de femmes pour informer les électrices à propos des systèmes politiques.

Marie-Ève Desroches estime que les discussions entre collègues et amis à propos des campagnes électorales sont importantes pour les choix qui seront pris pendant le jour du vote. « Le contexte pandémique, qui a entraîné le télétravail et la distanciation sociale, n’aide [malheureusement] pas [la tenue de] ces discussions-là », admet-elle.

Mme Desroches souligne qu’il faut aussi insister sur le fait que les votes vont avoir des impacts à long terme. « Il faut faire sentir que [leur vote] va faire une différence », conclut-elle.