Les banques alimentaires manquent d'air

La hausse de l'inflation mène la vie dure aux banques alimentaires, qui se retrouvent à la fois submergées de demandes et en manque de fonds. Les aides provinciales ne suffiront probablement pas, selon Jean-Marc Fontan, un spécialiste en économie sociale.
« On avait 40 demandes de nourriture par semaine et, maintenant, on en a 120 », explique au téléphone le président fondateur de la banque alimentaire Aylwin d'Hochelaga-Maisonneuve, Alexandre Paradis.
Son organisation s'en tire plutôt bien malgré un contexte économique difficile : Aylwin parvient même à venir en aide à deux autres banques alimentaires de Montréal qui peinent à se procurer assez de denrées. La situation de son organisme est cependant loin d'être représentative de l'ensemble des banques de l'Île.
Monsieur et madame Tout-le-Monde
Chaque mois, plus d'un demi-million de Québécois ont recours à des services de denrées alimentaires - un nombre qui traduit une augmentation de 22 % par rapport à l'ère prépandémique. « Ce sont maintenant monsieur et madame Tout-le-Monde qui viennent chercher de l'aide, remarque le président fondateur d'Aylwin. On a vraiment vu de gros changements dans notre clientèle. »
Jean-Marc Fontan, qui est professeur au Département de sociologie de l'UQAM, est bien au fait de cette hausse du taux annuel d'inflation. Ce dernier a bondi de 4,4 % à 5,3 % au Québec entre les mois de septembre et octobre derniers. " La pandémie a engendré moins de dépenses de la part des consommateurs, malgré l'argent [du gouvernement fédéral] qui continuait de rentrer, a-t-il expliqué. Pour M. Fontan, c'est dans ce petit gain que l'on puise pour augmenter les prix des aliments, notamment". S'ensuit un cercle vicieux, où tout le monde est perdant. Les contribuables se retrouvent face à des denrées aux prix exorbitants, donc se tournent vers les banques alimentaires, mais ces dernières doivent débourser davantage pour se procurer lesdites denrées. Le président fondateur d'Aylwin dit avoir vu un bouquet de brocoli à 6,50 $. « Ça creuse les inégalités, se désole pour sa part M. Fontan. Les gens moins nantis voient leur pouvoir d'achat diminuer. »
Une aide suffisante?
Jean-Marc Fontan salue l'arrivée des aides provinciales de 200 $ par ménage moins nanti et de 3 millions de dollars aux organismes communautaires, mais craint que la solution doive être durable. « Inévitablement, ce seront les salaires qui devront être augmentés, parce que ces aides ont toujours une fin », juge-t-il.
Comme le soulève Alexandre Paradis, personne ne devrait avoir à « choisir entre payer son loyer ou son épicerie ».