Le Sacre du printemps : corps de grésillements

La première du Sacre du printemps de la Compagnie Marie Chouinard a été présentée mardi soir sous la forme d'une version plus bestiale et moins narrative du célèbre ballet d'Igor Stravinsky.
Les sons aigus et presque obsédants, perceptibles avant même que les danseurs et danseuses ne fassent leur entrée sur scène, donnent rapidement le ton de l'interprétation qu'a faite Marie Chouinard du classique. Saccadée, impressionnante, mais angoissante, sa chorégraphie se dessine sur scène sans que l'on puisse réellement en saisir l'essence. C'est son souhait : l'ancienne danseuse mise sur l'instantanéité du mouvement plutôt que sur sa portée narrative.
Registre carré
Rarement rassemblés, les danseurs et danseuses font presque exclusivement progresser Le Sacre par l'entremise de solos, de duos et de trios.
La gestuelle a une signature évidente, même un peu trop. Les coudes pliés, les cous qui semblent disloqués et les poitrines dénudées vers le ciel habitent tous les corps, sans exception. Si quelques artistes se démarquent par une fluidité enlevante, la plupart laissent parfois paraître un essoufflement qui nuit à l'amplitude des mouvements.
Sujets à dissection
Le décor, minimaliste, mais réfléchi, attire toute l'attention sur les corps contorsionnés. Des jets de lumière projetés en croissants les suivent doucement, comme pour inciter à les examiner. Parfois, en provenance des coulisses, ils illuminent crûment les formes nues des interprètes. Les corps se retrouvent découpés sous l'œil du public, secoués de spasmes qui manquent cependant de réalisme. Ardue est la tâche de réinventer Le Sacre du printemps, et la Compagnie Marie Chouinard, malgré des danseurs et danseurs d'un grand talent, n'a su y échapper.