Le milieu du documentaire appelle à l'aide
Une étude menée de concert par l'UQAM et l'ARRQ donne des pistes de solution pour la survie et la prospérité du documentaire.
L'ambiance était au soulagement plutôt qu'à la fête lors du lancement en ligne du rapport Le métier de documentariste: une pratique de création menacée?, mardi soir, alors que la recherche lancée par l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec et menée à l'UQAM lève le voile sur les conditions souvent difficiles du métier de documentariste.
Pour plusieurs des documentaristes présents, une telle publication leur donne le sentiment d'être enfin entendus, à défaut d'être débarrassés de leurs tracas.
La fluctuation constante du salaire d'année en année, le manque de connaissance des régimes d'assurance auxquels les réalisateurs et réalisatrices sont admissibles et les restrictions de temps et de ressources humaines ressortent comme des lacunes majeures, selon l'étude. Les données ont été récoltées à partir d'entretiens en profondeur avec 26 réalisateurs et réalisatrices québécois de profils jugés représentatifs du milieu.
Une première partie de l'étude contenant des données quantitatives avait paru en 2017. Pour la cinéaste et chercheuse principale du projet, Diane Poitras, il était nécessaire de "voir comment ça se vivait concrètement" en poursuivant le sujet avec un angle plus personnel.
Le rapport rappelle ainsi une diminution de 87 millions de dollars par année du financement accordé aux documentaires par CBC/Radio-Canada entre 2007 et 2016, malgré une hausse remarquée dans l'intérêt du public pour ce genre cinématographique.
Refléter la réalité
"Ce qu'on demande dans un premier temps, c'est une façon de s'organiser des modalités de financement pour que ça reflète un peu plus la réalité des documentaristes, résume Diane Poitras. Très peu d'entre elles et d'entre eux vivent de leur métier. Ils sont obligés de faire d'autres métiers pour réussir à joindre les deux bouts."
Une autre statistique frappante: seulement 4 des 12 femmes interrogées avaient des enfants, contre 11 hommes sur 14. "Ça en dit long sur la situation des femmes dans le métier", a remarqué Mme Poitras.
Tous ces constats sont faits "sans beaucoup de surprise" du côté des documentaristes, soutient la chercheuse.
Celle qui est également professeure en pratiques documentaires à l'École des médias de l'UQAM dit tout de même encourager ses étudiants à se lancer dans le milieu. "Les [réalisateurs] voient que c'est difficile dans la vie, mais en même temps ils persistent, ils ne veulent pas changer de métier, souligne Diane Poitras. S'ils restent, c'est parce qu'ils trouvent une satisfaction, un sentiment d'utilité sociale et une fierté de produire des choses qui résonnent dans le monde."