La réalité parfois douloureuse de la politique dans les basses Laurentides

Dans les municipalités qui longent l’autoroute des Laurentides entre Saint-Jérôme et Mont-Laurier, les courageux qui s’aventurent sur les trois paliers de gouvernement peinent parfois à s’adapter au climat hostile du monde politique de la région.
Un territoire en changement
Très peu de circonscriptions fédérales peuvent prétendre être aussi diversifiées que celle de Laurentides-Labelle dans les basses Laurentides au Québec. De Saint-Sauveur aux rives du réservoir Mitchinamecus en passant par Mont-Laurier, les 43 municipalités du territoire sont géographiquement variées autant qu’elles le sont démographiquement.
Sur les plaines d’Arundel résident des communautés de fermiers et des familles établies sur les terres depuis des générations. À Val-David, des masses d’artistes ont quitté Montréal pour s’installer dans un petit village rustique à flanc de montagne.
Les villes de Mont-Tremblant et de Saint-Sauveur accueillent de plus en plus de jeunes professionnels qui sont allés rejoindre des cabinets d’avocats ou des firmes d’ingénierie desservant les quantités importantes de nouveaux arrivants quittant le monde urbain à la recherche d’un train de vie plus serein.

Plus d’électeurs dans la région
« Dans notre département d’évaluation foncière, nous avons vu les demandes de mutation plus que doubler pendant les deux dernières années. Nous n’avons pas assez de personnel pour répondre à la demande et nous sommes obligés d’embaucher des étudiants qui ont à peine fini leur première année d’études », indique la Directrice générale et secrétaire-trésorière de la MRC des Laurentides, Nancy Pelletier.
Le préfet de la MRC et maire de la municipalité de Brébeuf, Marc l’Heureux, le confirme. « Les gens qui arrivent sur le territoire sont des enseignants et des architectes, mais aussi des travailleurs manuels. Tout ce que nous savons, c’est qu’il en arrive beaucoup », mentionne-t-il.
Pour les politiciens de la région, plus d’électeurs équivalent malheureusement aussi à plus de détracteurs de plus en plus vocaux, autant pour les législateurs établis que pour les candidats. Pour Marie-Hélène Gaudreau, députée du Bloc qui vient de remporter un second mandat consécutif dans la circonscription fédérale Laurentides-Labelle avec 50,1 % des voix, il est courant de faire face à des insultes et des propos haineux. « C’est certain que les médias sociaux n’aident pas la cause. Les choses qui s’y disent parfois sont blessantes et affectent certainement les politiciens », mentionne-t-elle.
Propos vitrioliques
Pour certains, les comportements répréhensibles de quelques-uns de leurs électeurs peuvent être trop difficiles à ignorer. C’est le cas de la mairesse de Val-David, Kathy Poulin. « Je n’ai pas la carapace assez dûre pour constamment tenir tête à des gens qui m’insultent. C’est une des raisons pour laquelle je ne me représenterai pas aux élections municipales de cette année », affirme-t-elle.
Elle n’est pas la seule. Marc L’Heureux, qui a travaillé étroitement avec elles et d’autres élus sur le conseil des maires de la MRC des Laurentides, raconte que ce sont surtout les femmes vers lesquelles sont dirigés les propos haineux. « Elles se font dire de retourner à leurs chaudrons et de lâcher la politique. C’est inacceptable », déclare-t-il.

La montée politique de Mme Poulin a été rapide. Élue conseillère municipale à sa première tentative en 2013, elle est ensuite devenue mairesse quatre ans plus tard. « J’ai travaillé en Afrique du Sud, au sein de plusieurs OBNL et pour Équiterre. Je voulais faire du bien au Québec aussi et c’est pour cette raison que je suis entrée en politique municipale à Val-David. C’était vraiment pour l’amour de l’endroit et pour aider les résidents. Je suis très fière de plusieurs choses que mon équipe et moi avons accomplies pendant nos quatre ans », énonce-t-elle.
Certains projets majeurs ont cependant causé une division importante au sein de la municipalité et ont parfois mené à des critiques de mauvaise foi à l’égard de la mairesse. C’est le cas du dossier de l’asphaltage de la piste cyclable le P’tit Train du Nord. « Avant de paver la piste cyclable, nous avons bien sûr effectué des études sur les effets possibles », mentionne-t-elle. Les données ont démontré qu’il est plus nocif pour l’environnement de garder une voie de la sorte non pavée. La poussière de roche qui s’infiltre dans les terres lorsqu’il pleut peut nuire aux cours d’eau de la région. L’asphaltage ne créer pas d’îlot de chaleur. « Cependant, malgré les résultats de l’étude, certaines personnes étaient certaines du contraire. Ils étaient convaincus que le pavage créerait des îlots de chaleurs et il était impossible de changer leur avis », ajoute la mairesse.

Ce dossier a été un enjeu clé pour la région et les résidents ne se sont pas gênés pour critiquer Mme Poulin qui n’a plus d’intérêt à rester en politique municipale et à être bombardée par autant de négativité.
Critiques citoyennes à la hausse en campagne
En tant que femme dans le monde politique, Marie-Hélène Gaudreau fait également face à ce type de négativité de la part d’électeurs et elle croit que la situation est pire en temps de campagne électorale. « Ce n’est pas vraiment une chose à laquelle on peut s’habituer. Même avec plusieurs années d’expérience, il arrive qu’on soit affecté par les choses qui se disent, tant en personne que sur les réseaux sociaux », raconte-t-elle.
Elle est d’avis que la clé est de trouver une façon de s’échapper, de trouver les activités qui lui permettent de prendre du recul. Elle mentionne le paddle board comme passe-temps qu’elle affectionne particulièrement. « Quoi que ce soit qui se fait en nature et qui me permet de déconnecter. J’en ai besoin », confie-t-elle.
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Malgré les difficultés, Mme Gaudreau continuera de travailler pour le bien de ses électeurs. « J’aime tellement cette région et les gens qui y vivent. Les propos de quelques-uns ne m’empêcheront pas de me donner entièrement pour améliorer la vie des résidents de notre territoire qui le méritent tant », lance-t-elle. Avec un second mandat en main, elle a bien fait de continuer à se battre. Elle est de nouveau en position d’aider les résidents de Laurentides-Labelle, même ceux qui s’en prennent à elle.