Birmanie : la population se lève, la junte réplique

La tension continue de monter dans le pays d'Asie du Sud-Est alors qu'on recense les premières victimes du putsch

Birmanie : la population se lève, la junte réplique
« Nous demandons à nouveau la libération immédiate et inconditionnelle [...] de la conseillère d'État Aung San Suu Kyi et le président Win Myint, et nous continuons à soutenir le peuple du Myanmar dans sa quête de démocratie et de liberté. » - Extrait d'un communiqué des ministres des Affaires étrangères du G7

Phrases peintes sur les routes et les toits, projection d'images sur les murs de la ville, ralentissement volontaire de la circulation : les manifestants prodémocratie en Birmanie ont fait preuve d'ingéniosité ces derniers jours pour faire entendre leur message de façon pacifique au nouveau gouvernement militaire - et au reste du monde.

« WE WANT DEMOCRACY » (nous voulons la démocratie), pouvait-on lire en gigantesques lettres blanches dans les rues de Rangoun, la plus grande ville du pays. Selon le journal Irrawaddy, certains auraient même collé des milliers de post-it encourageant les habitants à adhérer au mouvement de désobéissance civile partout sur les bâtiments.

Une semaine de grève générale s'amorçait aussi lundi, ajoutant aux moyens de protestation utilisés par les manifestations birmans.

Un week-end « sanglant »

Les manifestations pacifiques se sont poursuivies durant la fin de semaine à Naypyidaw, la capitale, et à Rangoun, notamment, où ont déferlé des centaines de milliers de personnes brandissant des pancartes à l'effigie de la cheffe du gouvernement renversé Aung San Suu Kyi, bravant les menaces de l'armée. Le général Min Aung Hlaing, le chef de la junte, avait annoncé dimanche que « tout manifestant incitant à la confrontation avec le régime militaire le paiera[it] au prix de sa vie ».

Et c'est ce qui s'est produit : âgée d'à peine 19 ans, Mya Thwe Thwe Khaing a péri dimanche par balle réelle, devenant par conséquent la première victime du conflit ainsi qu'une véritable martyre aux yeux du mouvement populaire. Des obsèques ont été tenues en son honneur à Naypyidaw, la capitale, événement qui s'est rapidement transformé en célébration nationale, des convois d'automobiles flanquées de son portrait ayant été aperçus à la grandeur du pays.

Deux autres personnes ont perdu la vie de manière semblable samedi, en plus d'un homme qui aurait été abattu alors qu'il patrouillait pour éviter les arrestations massives dans son quartier, à Rangoun.

Des manifestations étaient aussi prévues mardi, mais ont finalement été de moindre ampleur que celles des autres jours.

Le G7 rétorque

Les ministres des Affaires étrangères du G7 - les sept plus grandes puissances du monde - ont publié mardi un communiqué dénonçant les actes de répression de la junte contre les manifestants. « L'utilisation de balles réelles contre des personnes non armées est inacceptable. Quiconque répond aux protestations pacifiques par la violence doit être tenu de rendre des comptes », écrivent-ils.

Ils ajoutent : « Nous demandons à nouveau la libération immédiate et inconditionnelle des personnes détenues arbitrairement, notamment la conseillère d'État Aung San Suu Kyi et le président Win Myint, et nous continuons à soutenir le peuple du Myanmar dans sa quête de démocratie et de liberté. »

L'Union européenne a également sévi, le chef de la diplomatie Josep Borrell déclarant que « toute aide financière directe [...] aux programmes de réforme du gouvernement [était] suspendue ».

De son côté, Min Aung Hlaing a annoncé que des sanctions seraient émises contre les médias qui emploieraient le terme « coup d'État » pour qualifier la prise de pouvoir par l'armée le 1er février.

Plus de 680 personnes ont été arrêtées depuis ce jour, selon l'Association d'aide aux prisonniers politiques.

« Birmanie ou Myanmar? »

En soi, les deux appellations désignent le même pays et sont utilisées depuis des siècles. Cependant, le mot que l'on choisit peut être associé à une idéologie.

De fait, la dénomination Birmanie est apparue au moment de la colonisation britannique, tandis que le mot Myanmar est aujourd'hui perçu comme plus neutre car il ne fait pas référence aux Birmans majoritaires et est la dénomination employée par l'ONU. En effet, le pays est en proie à de perpétuels conflits ethniques depuis sa création.

Birmanie demeure néanmoins l'option que l'on priorise en français en raison des termes " birman/Birman " et " birmane/Birmane " pouvant en découler.