Un avenir morose se dessine pour TVA Sport
Un avenir morose se dessine pour TVA Sport
Par Flora Tauliaut
Avec l'annonce d'une autre vague de licenciement chez le Groupe TVA, le futur de TVA Sport dans le paysage du journalisme sportif au Québec est plus que jamais incertain.
Depuis plusieurs années le média encaisse les déficits dans un contexte de crise financière dans le monde journalistique. Mais il semblerait que cette fois, même son patron Pierre Karl Péladeau présage d'un avenir " pas très rose " pour sa branche spécialisée.
Après des crises financières répétées, le pari du retour des Nordiques perdu et une concurrence " déloyale " des GAFAM et de Radio-Canada, la question d'un avenir pour le média dans le journalisme sportif québécois se pose. La dernière vague de licenciement et le bilan de 9 millions de dollars de pertes forcent à penser que TVA Sport tangue de plus en plus vers le naufrage.
Un mauvais départ
La chaîne TVA Sport a connu des coups durs de multiples coups durs au fil des années. À son lancement, le groupe avait misé gros sur le retour des Nordiques, qui aurait pu propulser le média, ce dernier ayant basé une importante partie de son contenu sur le hockey. Un pari raté qui a sonné le premier coup dur.
Actuellement, la chaîne peine à faire des profits sur ses investissements. Les droits de diffusion des séries éliminatoires coûtent cher à la boite, pour des résultats qui ne sont pas toujours au rendez-vous. L'exemple qui sied parfaitement à la situation est la Coupe Stanley dont la diffusion sur l'année 2020-2021 avait fait perdre près de onze millions au média. " Devant renouveler son entente avec les droits de hockey d'ici 2026, le média ne fait que perdre de l'argent avec lesdits droits. Est-ce qu'elle sera tentée de le faire, j'en doute ", explique Paul Rivard.
Ce n'est pas la première fois que TVA Sport annonce une vague de licenciement. En 2016, en 2020 et récemment en 2022, des têtes d'affiche comme Geneviève Tardif, Daniel Melançon ou encore Louis Jean avaient été congédiées.
Un pari perdu d'avance ?
Pointée du doigt par Pierre Karl Péladeau dans un communiqué, la " course aux cotes d'écoute " déloyale de Radio-Canada rend amer et laisse planer un sentiment d'inégalité.
" Radio-Canada est une entreprise subventionnée annuellement à un milliard de dollars par le gouvernement […] il y a une iniquité énorme avec un média privé qui doit aller chercher chaque dollar par le bien de ventes de publicités ", explique Paul Rivard, journaliste et professeur à l'École des médias à l'UQAM.
Les GAFAM ont leur poids dans la balance, beaucoup ayant déjà dénoncés la non-rémunération des médias pour l'utilisation de leur contenu sur internet. La loi C-18 qui vise justement à lutter contre ce problème en obligeant les géants du web à rémunérer les salles de rédaction pour l'utilisation d leur contenu est encore en phase de débat au Sénat.
TVA Sport doit faire face à une rude concurrence sur le marché, avec la tendance des spectateurs à migrer vers d'autres plateformes plus attractives. Surtout avec l'arrivée des géants du numérique dans la course comme Apple TV qui a obtenu les droits de diffusion pour la saison 2023 de La Major League Soccer (MLS). Malheureusement, beaucoup de médias québécois ont tardé et tardent encore à suivre le même chemin, afin d'aller chercher le lectorat où ils se trouvent.
" Exactement comme les films ou les séries télé, les gens vont payer un abonnement de 10 à 20 dollars, et au lieu d'avoir un abonnement au câble distributeur, ils vont aller chercher par internet leur télé à la carte. Il y a une mouvance énorme vers la consommation d'images par streaming "
Est ce la fin?
Le PDG du groupe Québecor est clair sur la question de l'avenir de TVA Sport : le futur n'annonce rien de bon. Paul Rivard, qui a participé au lancement de TVA Sport, lui parle d'une conjoncture. Les iniquités et le désintérêt pour la télévision et la radio traditionnelle sportive représentent à ses yeux une tempête pour le média.
" C'est avec énormément de tristesse que je constate le futur du média. Je suis de cet avis après avoir entendu le patron du groupe dire que " l'avenir n'est pas rose ". Malheureusement je dois dire qu'il est lucide ", se livre le professeur.